La onzième…

L’alcôve de Sophie Sirot (Cl. C. Bureau)

Onzième biennale de l’estampe
Atrium de Chaville
925 avenue Roger Salengro 92370 Chaville
4 au 17 novembre 2023

L’atelier associatif « Estampe de Chaville », présidé par Jean Benais et dirigé par André Bongibault, pour sa onzième biennale a choisi de mettre à l’honneur les stampassines et les stampassins qui se sont formés à l’École Estienne et d’offrir à chaque exposant de cet atelier dynamique une sorte d’alcôve où il puisse présenter au public une mini exposition personnelle caractéristique de son travail. Ces innovations bienvenues exigent, pour une visite attentive, de prendre son temps pour déambuler dans le vaste espace Louvois de l’Atrium de Chaville qui les ont accueillies afin d’admirer les estampes des trente-sept exposants de cette édition 2023.

L’espace de l’École Estienne (Cl. Claude Bureau)

À l’honneur donc l’École Estienne qui maintient depuis des années, contre vents et marées, l’enseignement des métiers, traditions et nouvelles techniques de la belle estampe. Un enseignement assis sur une solide formation artistique et générale, au service du livre et de l’édition d’art. Elle a été ici présente au travers des estampes de deux anciens de l’école : André Bongibault avec ses grandes compositions magistrales et Sébastien James avec ses allégories truculentes comme « Le chevalier à la brosse au carré », de l’actuelle professeure de gravure, Caroline Bouyer avec de grands formats de ses paysages industriels et urbains et de cinq élèves qui effectuent leur stage de perfectionnement à l’atelier de Chaville. Parmi eux on a pu remarquer le dynamisme des corps dansants d’Ulysse Devillers ou le bestiaire fantastique de Cyril Boivin.

L’alcôve d’Ulysse Devillers (Cl. C. Bureau)

L’accrochage des autres exposants, par le nombre important de leurs estampes, permet de flâner d’alcôve en alcôve et de se faire une idée précise du monde de chacun exprimé dans des manières et techniques différentes. Olivier Musseau, sur un sujet rebattu, a proposé une installation para-solaire particulièrement originale pour sa suite égyptienne « Au fil de l’eau » avec un leporello circulaire où l’on chemine dans un cycle éternel de la vie à la mort en éternel retour. Tout en nuances fines de traits et de gris les petits paysages de Jean-Pierre Peyroulou incitent à se remémorer nos promenades champêtres. Les êtres fantastiques, mi-humains mi-végétaux, d’Emma Biraud dansent comme dans un rêve éveillé. Franck Genis restitue par la force graphique de ses traits la puissance du fleuve Amazone qui se poursuit plus apaisée dans ses trois livres d’artistes : « Arbres », « Et la mer dit » et « Fables ». Et bien d’autres merveilles à admirer suivant les affinités de chacun pendant cette onzième biennale de l’« Estampe de Chaville ».

Claude Bureau

Au fil du temps…

« Afflux », burin (Cl. L. Paton)

« Au fil du temps : regards croisés »
Catherine Gillet, gravures et dessins
2 au 25 novembre 2023
Fondation Taylor, 1, rue La Bruyère, 75009 Paris

Dans les beaux locaux de la Fondation Taylor qui viennent de faire peau neuve, la buriniste Catherine Gillet nous accueille avec une planche énigmatique toute en douceur et en rondeur intitulée «  Nouveau monde ». Puis on retrouve ces blocs noirs striés qui lui sont chers, comme en suspension dans l’espace blanc de la page. On ne sait pas si ce sont les roches qui coulent ou le monde qui pleure. Mais on cesse bientôt de s’interroger, emporté par les mille surprises fines et scintillantes d’un burin à la fois délicat et profond qui sait inscrire en traits lumineux ce « Vivre pourtant » qu’Éluard appelait « le dur désir de durer ».

« Vivre pourtant », graphite et pierre noire (Cl. L. Paton)

Des dessins grands formats effectués au graphite et à la pierre noire et où la matière s’enroule, à de ravissantes miniatures gravées (En chemin) , nous allons de découvertes en découvertes. Jusqu’à ces « Afflux » par lesquels la buriniste nous livre sa vision légère et étincelante d’un jardin zen .

« Afflux » (détail), burin (Cl. L. Paton)

Ne manquez pas au 4ème étage l’exposition « La Taille & le Crayon », estampes et dessins évoquant des espèces en voie d’apparition à partir d’un texte de Raphaël Saint-Rémy.

Laurence Paton

Paris gravé

« Sortie du métro à Réaumur-Sébastopol », aquatinte, zinc,
tirage (10 ex.) à bords perdus, 37, 5 x 28 cm, 2021 (Cl. M. Préaud)

« Paris gravé »
2 au 26 novembre 2023
Boutique Rouge grenade
85bis rue de Bagnolet 75020 Paris

« L’Observatoire de la Sorbonne », aquatinte, zinc,
tirage (12 ex.) à bords perdus,39 x 49, 5 cm, 2023 (Cl. M. Préaud)

Malgré les efforts soutenus de ses édiles successifs, Paris reste encore une belle ville, profitons-en, son avenir est incertain. Ceux qui l’aiment la retrouvent en partie dans les estampes de Corinne Lepeytre. Cela fait plusieurs années qu’elle nous montre les endroits qui lui plaisent, qui ont pour elle et peut-être pour nous une signification importante, que ce soit pour le regard ou pour le sentiment — et du sentiment, il y en a. Apercevoir au loin le dôme de l’observatoire de la Sorbonne, sortir du métro entre les ramures d’Hector Guimard, changer de quartier grâce à un passage couvert, s’aveugler momentanément dans le reflet de verre et d’acier de quelque bâtisse plus moderne (elle m’a avoué qu’elle aimait bien le verre et l’acier, à chacun ses goûts), mais aussi reconnaître la verrière de l’atelier de la Fondation Taylor, voir vibrer dans la brume de chaleur émanant des toitures haussmanniennes en zinc (un rappel, me dit-elle, de celui sur lequel elle grave ses aquatintes, subtile symbiose) les lointains banlieusards, voilà ce que Corinne Lepeytre nous propose avec la quarantaine d’estampes, exécutées entre 2018 et 2023, présentées dans la boutique de Rouge Grenade1.

« Rue La Bruyère, l’immeuble de la Fondation Taylor », aquatinte, zinc,
tirage (10 ex.) à bords perdus,29 x 39 cm, 2020 (Cl. M. Préaud)

Outre la beauté de son travail, j’ai personnellement apprécié que ses estampes, imprimées par elle-même à bords perdus, se présentent donc sans marges pour qu’en gênent la lecture les inscriptions diverses plus ou moins bien écrites dont abusent généralement les stampassins et stampassines d’aujourd’hui. Les informations nécessaires se retrouvent au verso.

Maxime Préaud

1 – 85bis rue de Bagnolet (75020, M° Porte de Bagnolet, ligne 3, Bus 76). Où Françoise Trotabas propose aussi des objets d’artisanat d’art.